texte de Julie d'Ambroso, rédactrice pour FranceFineArt.
Le duo Hongrois, Kornel Szilàgyi et Nándor Hevesi sous le pseudonyme Igor et Ivan Buharov réalisent des films indépendants mais aussi expérimentaux, de long métrages, courts métrages, documentaires, animations, ainsi que des films musicaux,…
Frontière entre rêve et réalité, cette œuvre oscille toujours entre les arts plastiques et l’art cinématographique. En 1995, un groupe se forme appelé Multiartist organisant des performances audiovisuelles surréalistes où l’image, la musique et les mots sont devenus un tout organique après le chaos. Les Buharov utilisent le procédé de la caméra Super 8 en combinant des éléments de tournage expérimental et de narration classique.
SLOW MIRROR (2007) Atmosphère singulière et empreinte cinématographique
Egon, personnage principal, handicapé et âgé de 33 ans subit un profond isolement. De cette solitude, il ne trouve aucune solution. Vient ensuite une femme d’âge mûr désorientée, puis la mort d’un homme noyé dans une piscine. Autant d’éléments pour décrire un film qui touche au réel et à l’irréel, à la liberté comme au contrôle. Peut-on parler de proposition cinématographique radicale derrière laquelle se cacherait un voyage onirique ?
Film dérangeant dès le premier abord, sombre et angoissant, une ambiance pesante, lugubre et morbide, il est source d’un malaise omniprésent. Mais à l’inverse, si on le décortique plus en détail, on sera surpris de la profondeur des scènes.
Egon se veut borné, seul à affronter les problèmes, il n'accepte aucune aide pour s’en sortir. Prisonnier entre le rêve et la réalité, il ne peut que survivre. Tant de souffrance notamment dû à cette paralysie inexpliquée fait que le rêve s’évapore et son âme se détache.
Un autre personnage marquant, est celui de la femme d’âge mûr, perdue, hystérique... qui ne peut gérer ses émotions. Un trait important est porté à son monologue, une nécessité d’être rassurée, sécurisée en permanence met l’accent sur le besoin de contrôle perpétuel.
Le film déroute, le spectateur a parfois tendance à en perdre le fil conducteur. SLOW MIRROR nous remet en question, nous bouscule, mais sa force première est de faire réagir le spectateur à travers les personnages du film, mais aussi de comment le spectateur se place dans sa propre vie réelle.
Alors que certaines scènes tournées en extérieur plantent leur décor dans des lieux spacieux (lac, forêt enneigée), à l'inverse d’autres se déroulent dans des espaces confinés, maisonnettes de famille ou d’amis.
Les scènes manquent parfois d’éclairage, les sujets sombres, les personnages à peine visibles. Néamoins, l’usage de la caméra Super 8 donne une vrai singularité, tant dans les textures visuelles riches en couleurs, que dans la matière du grain de l’image, qui n’est pas forcément nette mais d’une réelle empreinte cinématographique. Une multitude de nuances de couleurs aux allures froides en passant par des blancs cassés, gris, noir, bleutés pour aller vers des jaunes effacés et verdâtres.
Ce film rempli de sens, nous pousse à la réflexion et au questionnement. Notamment, sur quelle est notre part de rêve et de réalité ? Comment ne pas se perdre dans le rêve d’un autre ? Comment se positionner dans la société ? Comment agir avec soi- même et avec l’autre ? L’univers d’Igor et Ivan Buharov, nous amène à cette prise de conscience à travers les personnages de SLOW MIRROR, mais aussi dans les autres courts métrages du DVD : MOTHMILK, ONEHEADWORD PROTECTION et HOTEL TUBU.
Julie d'Ambroso
Extrait du film : https://re-voir.com/shop/fr/igor-ivan-buharov/891-les-freres-buharov-slow-mirror.html
le DVD comprend 4 films d’Igor & Ivan Buharov : SLOW MIRROR / LASSÚ TÜKÖR - 84 mins, Super8 blow-up to 35mm, color, 2007 MOTHMILK / MOLYTEJ - 9 mins, Super8, color, 2009 ONEHEADWORD PROTECTION / EGYVEZÉRSZAVAS VÉDELEM - 7 mins, Super8, color, 2006 HOTEL TUBU - 5 mins, Super8, color, 2002
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