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“Barbara Hepworth” article 2856
au Musée Rodin, Paris

du 5 novembre 2019 au 22 mars 2020



www.musee-rodin.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 31 octobre 2019.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Barbara Hepworth, Two Forms [Deux Formes], 1937. Marbre, H. 72,5 ; L. 60,4 ; P. 47 cm, collection privée en dépôt à The Hepworth Wakefield, Barbara Hepworth, © Bowness, ph. © Hepworth Estate.
2/  Barbara Hepworth, Discs in Echelon, 1935. Fonte 1964, bronze poli, H. 34,3 ; L. 51 ; P. 27,3 cm, Hepworth Estate, en prêt à The Hepworth Wakefield, Barbara Hepworth, © Bowness, ph. © Hepworth Estate.
3/  Barbara Hepworth travaillant au plâtre Oval Form (Trezion) au Palais de Danse, 1963. H. 22,3 ; L. 20 cm, Collection Bowness, The Hepworth photograph collection, © ph. Val Wilmer.

 


2856_Barbara-Hepworth audio
Interview de Catherine Chevillot,
conservateur général du patrimoine, directrice du musée Rodin et co-commissaire de l'exposition,

par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 31 octobre 2019, durée 11'06". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissariat :
Catherine Chevillot, conservateur général du patrimoine, directrice du musée Rodin
Sara Matson, conservateur chargée des expositions et des collections permanentes, conservateur en chef du Barbara Hepworth Museum, Tate St Ives.
Avec la collaboration de Sophie Bowness




Le musée Rodin, en collaboration avec la Tate, présente l’oeuvre de Barbara Hepworth (1903-1975), figure majeure de la sculpture britannique du XXe siècle. Encore aujourd’hui méconnue en France, Barbara Hepworth, qui côtoyait Henry Moore, Picasso ou Mondrian, a pourtant révolutionné la sculpture et fait émerger une nouvelle sensibilité esthétique. Ses oeuvres abstraites, aussi pures que poétiques aspirent à un monde idéal et pacifique. Le musée Rodin rend hommage à cette femme artiste et présente ses oeuvres saisissantes, entre vide et plein, qui s’emparent du visiteur et ne le quittent plus.



Une nouvelle esthétique : la sculpture d’un monde moderne

Après Rodin (1840-1917), l’éclosion d’une nouvelle sculpture émerge. En 1905, Maillol redonne à la statuaire densité et autonomie. À partir de 1909, Brancusi porte ce retour aux caractères fondateurs de la sculpture à sa plus grande épure. Le deuxième acte se déroule durant les années 1920, avec en Angleterre, Moore et Hepworth.

Loin de l’expressionnisme puissant de Rodin, Hepworth est en quête d’une nouvelle esthétique, privilégiant le langage des volumes et des formes. La nature est la grande source d’inspiration de la poésie du volume développée par Barbara Hepworth.

La sculpture organique de Hepworth est aussi une vision du monde : après la Première Guerre mondiale, la société trouve dans cette nouvelle sensibilité une vision pacifiée loin des atrocités de la guerre. Le vocabulaire d’Hepworth s’oppose aux mondes du pathos, de la construction ou de l’univers machiniste. En 1934, elle écrit que son objectif est de « projeter dans un médium plastique un peu de la vision abstraite et universelle de la beauté ». Son art réside tout entier dans le jeu entre formes convexes et concaves, dans une constante opposition entre vide et plein. Sous les dehors silencieux des formes pleines, l’univers de la sculpteure devient le lieu d’une nouvelle aspiration à un monde idéal, pour éviter, selon Hepworth, de « s’abandonner au désespoir ».

Cette exposition permet d’avoir une vue d’ensemble de sa carrière et de son œuvre sculptée peinte et dessinée, ainsi qu’un aperçu de ses méthodes de travail grâce à l’évocation de son atelier. De nombreuses photographies provenant de la famille complètent le parcours de l’exposition.



La redécouverte d’une femme artiste majeure

En France, avec son mari, le peintre Ben Nicholson, elle fréquente les milieux artistiques, visite Brancusi, Picasso, Braque, Mondrian et rencontre Arp, Calder, Mirò. Barbara Hepworth travailla à partir de 1939 en Cornouailles dont les paysages influencèrent son oeuvre.

Plus encore, elle a de son vivant une aura immense en Angleterre : en 1965 elle sera faite «Dame» de l’Empire britannique. Dès 1936, l’oeuvre Discs in Echelon entre dans les collections du MoMA de New York. Les expositions se succèdent : à la Biennale de Venise, San Francisco, Sao Paulo ou Tokyo...

Le musée Rodin est l’un des très rares lieux français dans lesquels Barbara Hepworth présente ses oeuvres de son vivant. Il revenait donc au musée Rodin, qui l’avait accueillie lors de manifestations collectives il y a plus de 60 ans, de faire découvrir au public français la quintessence de son univers poétique et saisissant.





Parcours de l’exposition


Figure de la sculpture anglaise du XXe siècle, Barbara Hepworth (1903-1975) a participé au profond renouvellement des formes qui s’opère dans l’entre-deux-guerres. Cette première exposition monographique organisée à Paris, en collaboration avec la Tate, présente sa carrière et son œuvre à partir des années 1930, ainsi que ses méthodes de travail grâce à l’évocation de son atelier de St Ives. Les oeuvres exposées témoignent de la modernité de son vocabulaire formel proche de l’abstraction et de sa poétique fortement inspirée par la nature, donnant une version singulière de la sculpture organique.

Barbara Hepworth et la France
L’entre-deux-guerres marque pour Barbara Hepworth sa reconnaissance en France. En 1933, elle y découvre l’avant-garde européenne grâce à son mari, le peintre Ben Nicholson, rencontre Constantin Brancusi, visite l’atelier de Jean Arp. À ce moment, Jean Hélion et Auguste Herbin créent le mouvement Abstraction-Création afin de promouvoir l’art non figuratif et l’invitent à exposer à leurs côtés avec les sculpteurs Jean Arp, Alexander Calder et Naum Gabo ainsi que Robert Delaunay, Piet Mondrian, Kurt Schwitters et Theo van Doesburg. Elle noue des amitiés avec Mondrian, Braque et Gabo. Après la guerre, le mouvement abstrait se recompose au travers du Salon des Réalités Nouvelles, auquel elle s’associe. Enfin, elle compte parmi les représentants de la Grande-Bretagne dans les Expositions internationales de sculpture contemporaine qui ont lieu au musée Rodin (1956-1971).

La reconnaissance internationale
Après 1945, Barbara Hepworth accède à un large succès. En 1961, elle reçoit la commande d’un monument destiné au siège de l’ONU, inauguré à New York en juin 1964. Les grands historiens de l’art lui accordent une place dans leurs histoires de la sculpture comme Sir Herbert Read en Angleterre, Abraham Marie Hammacher, directeur du musée Kröller-Muüller à Otterlo qui lui consacre une rétrospective en 1965, la Suisse-Allemande Carola Giedion-Welcker ou le français Michel Seuphor. Dès 1936, le Museum of Modern Art de New York acquiert Discs in Echelon et deux ans plus tard, l’artiste est exposée au Stedelijk Museum d’Amsterdam. Elle représente son pays à la Biennale de Venise en 1950, et obtient le premier prix de la Biennale de Sao Paulo en 1959. Des expositions circulent aux États-Unis, en Suisse, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Scandinavie et au Japon.

L’atelier
La préservation de l’atelier Trewyn Studio, à St Ives en Cornouailles, permet d’entrer dans l’univers de la pratique artistique de Barbara Hepworth. Dans sa conception de l’art comme dans son empathie intuitive pour le matériau, l’artiste donne à celui-ci une importance déterminante. Elle apprend très tôt la taille directe. Accordant une grande importance au travail de la main, elle préfère tailler seule jusqu’en 1940. L’outillage traditionnel est privilégié au détriment des machines électriques. La pratique de la sculpture est un véritable corps à corps avec la matière. St Ives, bordé par la mer, fut pour elle une constante source d’inspiration, tout comme les paysages environnants où une lumière abondante ne cesse de se réfléchir sur les rochers ou les monuments préhistoriques de la région. Les formes sculptées résultent de ses expériences en des lieux et des moments précis, et restituent au spectateur une vision du monde.

« La joie vivante des formes »
La sculpture de Barbara Hepworth est une alchimie entre monde intérieur, paysage et matériau. Les évidements pratiqués, les relations entre des éléments indépendants posés sur une même base sont une manière d’habiter l’espace chaque fois différemment, de trouver le juste rapport entre les volumes, d’équilibrer les tensions des différentes parties : éprouver chaque fois une nouvelle manière d’être au monde. Le but poursuivi est de revenir aux formes élémentaires pour apprendre à « échapper au chaos » et reconstruire un univers. Loin de traduire drame ou angoisse, les sculptures deviennent une sorte de contrepoison au monde déstructuré qui sort de la guerre. À la poésie des formes correspondent des matières choisies avec soin : marbres et albâtres, pierres de Portland ou ardoise sombre de Cornouailles. À côté des bois durs tropicaux comme le gaiac officinal (Lignum vitae), on trouve l’acajou ou le sycomore. Ses plus grandes satisfactions lui viennent de l’importation de guarea, un arbre des forêts tropicales, dont elle reçoit 17 tonnes en 1954 : elle taille alors Corinthos. Le passage au bronze à partir des années 1950 lui permet d’explorer d’autres formes, Curved Form (Trevalgan) ou Sea Form (Porthmeor), faisant écho à la poésie de la mer.