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“L’Inde au miroir des photographes” article 2857
au Musée Guimet, Paris

du 6 novembre 2019 au 17 février 2020



www.guimet.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 5 novembre 2019.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Samuel Bourne (1834-1912), Sans titre. Agra. Le Fort Rouge. La Musamman Burj. Épreuve sur papier albuminé, 1863-70, n°1223. AP15319. © MNAAG, Paris, Distr. RMN-Grand Palais / image musée Guimet.
2/  Studio Bourne (1834-1912) & Shepherd (actif 1858-1878), Sans titre. Udaipur. Le palais de Jag Mandir sur le lac Pichhola. Épreuve sur papier albuminé, 1873. AP15344. © MNAAG, Paris, Distr. RMN-Grand Palais / image musée Guimet.
3/  Bourne (1834-1912) & Shepherd (actif 1858-1878) (attribué à), Sans titre, Tukoji Rao II Holkar (1835-1886), maharajah d’Indore. Épreuve sur papier albuminé, 1877. AP15471. © MNAAG, Paris, Distr. RMN-Grand Palais / image musée Guimet.

 


2857_Inde audio
Interview de Jérôme Ghesquière,
responsable des collections photographiques du MNAAG et co-commissaire de l'exposition,

par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 5 novembre 2019, durée 23'13". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaires :
Sophie Makariou, Présidente du MNAAG, commissaire générale
Jérôme Ghesquière, Responsable des collections photographiques
Amina Okada, Conservatrice des collections indiennes




Les collections photographiques du musée national des arts asiatiques – Guimet continuent de dévoiler leurs trésors en faisant cette fois-ci halte en Inde dans la seconde moitié du 19e siècle. L’exposition est exceptionnelle en raison de la présentation pour la première fois de la riche collection de photographies anciennes sur l’Inde que possède le MNAAG. Elle l’est également pour l’important travail réalisé par les photographes professionnels dans le pays, vaste territoire qui stimula l’essor de la photographie dès ses débuts. Près d’une centaine de photographies illustrent la grandeur de la civilisation indienne, prises pour beaucoup d’entre elles dans le nord du pays.

Dix ans après la naissance de la photographie relayée par la presse britannique, Madras et Calcutta deviennent vers 1850 le foyer du développement de la photographie tant sur le plan technique qu’artistique. Le Raj britannique, fondé en 1858, offre un cadre propice à son essor, notamment par l’entremise de militaires, avant même l’arrivée de civils talentueux. Parmi ceux-ci le sergent Linnaeus Tripe débute dès 1854 et se présente à l’exposition de Madras où le jury qualifie son travail de « meilleure série de vues photographiques sur papier ». Considéré comme un auteur majeur des débuts de la photographie, il sera suivi de William Baker, sergent retraité qui fonda vers 1861 à Murree (actuel Pakistan) le studio Baker & Burke. En 1873, année de création de John Burke Studio, les tout premiers clichés de paysages sont créés au Cachemire, grâce à John Burke et à son associé. Les photographes partis en quête de nouveaux espaces arrivent sur place nantis d’une importante culture visuelle. C’est le cas de Samuel Bourne, qui de 1863 à 1870 à la faveur de trois importantes expéditions au Cachemire, réalise d’extraordinaires vues demeurées insignes dans l’histoire de la photographie de paysages. Sujets variés et inépuisables, chaque état a sa part dans l’originalité et plus particulièrement l’Inde du Nord pour la somptuosité de son architecture et de ses paysages, ainsi que la diversité de sa population ethnographique. Aujourd’hui les « icônes » d’un pays-continent, les villes comme Delhi, Fatehpur Sikri, Agra ou Bénarès (aujourd’hui Varanasi), les sites archéologiques ou monuments célèbres (Elephanta, Qubt Minar, Taj Mahal), ont fasciné leurs contemplateurs qui ont saisi leur monumentalité, utilisant des techniques d’enregistrement d’une grande richesse de détail.






Présentation de l’exposition :


La photographie en Inde au 19e siècle

1839 : la naissance de la photographie est annoncée à Paris. Immédiatement, la presse britannique s’en fait l’écho dans les grandes villes indiennes. Une décennie plus tard, Bombay, Calcutta et Madras sont les foyers de son développement technique et artistique. L’expansion du Raj – les Indes britanniques – offre un cadre propice à son essor avec les premiers opérateurs militaires. Cette invention technologique occidentale contribue à façonner l’image du pays. Les lumières de l’Inde, travaillées par l’oeil des photographes, rigoureusement mémorisées par la chambre noire, dessinent progressivement dans des tonalités dorées les contours du continent. Les sujets sont inépuisables. Chaque État, et plus particulièrement ceux du nord du pays, a sa part d’originalité dans la somptuosité de son architecture, sa diversité ethnographique ou encore la majesté de ses paysages. Les photographes de cette seconde moitié du 19e siècle façonnent à l’étranger l’image d’un pays pour beaucoup encore mystérieux et inconnu. Dans la transparence de l’émulsion des épreuves photographiques sur papier, l’Inde contemple son reflet.


Le sud de l’Inde
Créée en 1673 par la Compagnie française pour le commerce des Indes orientales, Pondichéry va devenir l’un des points d’entrée de la France en Inde. Plusieurs fois occupée ou détruite par les Hollandais puis les Anglais, elle devient à la fin du 19e siècle une étape importante sur la route de l’Indochine et reste française jusqu’en 1956. Dans les années 1860, C. Moyne, installé sur place, immortalise le passé illustre de la ville dans de nombreux clichés. Madras, située plus au nord, est fondée en 1639 par la British East India Company. Détruite en 1756 par les Français, elle se relève et prend à partir de 1761 le dessus sur Pondichéry. Parmi les militaires Anglais qui y sont stationnés, le sergent Linnaeus Tripe expose dès 1854 avant de devenir photographe officiel du gouvernement local. Il a laissé de nombreux tirages réalisés lors d’une expédition de quatre mois en Inde du Sud. Il quitte le pays en 1874.


Elephanta
Au large de Bombay (actuelle Mumbai), l’île d’Elephanta abrite un ensemble de cavernes et de sanctuaires rupestres, haut lieu du shivaïsme dès la seconde moitié du 6e siècle. Sans doute creusé sous la dynastie des Kalachuri (6e-7e siècle), le plus important sanctuaire rupestre du site est consacré au dieu Shiva. D’imposants panneaux en hauts-reliefs ornent les parois de la grotte et illustrent différents épisodes de la geste shivaïte, ainsi que certaines des formes principales revêtues par le dieu. Mais c’est dans l’axe de l’entrée de cette immense caverne que se découvre l’une des créations artistiques les plus grandioses que l’Inde ancienne ait produite, la Maheshamurti, sculpture colossale et tricéphale du dieu Shiva, révélé sous son aspect de dieu suprême, transcendant et éternel.


Le Qutb Minar, Delhi
Le Qutb Minar est l’un des monuments les plus emblématiques de Delhi. Il fut, comme la mosquée adjacente, construit par le sultan Qutb al-Din Aibak (r. 1206-1210), premier sultan de Delhi. L’imposante mosquée s’alimenta de la destruction de 27 temples hindous et jaïns des environs. Le pilier de fer, érigé au 4e siècle et haut de 7,2 mètres, se dresse devant sa façade. On a débattu de la fonction de la haute tour dite « tour de victoire », haute de 73 mètres. Son fût cannelé ceint de superbes bandeaux d’inscriptions, est animé de cinq balcons en encorbellement. Elle était destinée à « projeter l’ombre de Dieu de l’est à l’ouest ». Le dernier étage fut ajouté en 1369.


Fatehpur Sikri
De 1571 à 1585, Fatehpur Sikri – la « Ville de la Victoire » – fut l’éphémère capitale de l’Empire moghol. Elle fut fondée par l’empereur Akbar (r. 1556-1605) à la suite d’un voeu et afin de célébrer la naissance longtemps attendue d’un fils et successeur – Salim, futur empereur Jahangir, né en 1569. La ville royale est construite dans un grès rouge typique de la région où l’on retrouve les styles les plus éclectiques mêlant des formes d’inspiration persane à la transcription en pierre de l’architecture de bois du Gujarat qui venait alors d’être conquis par les Moghols en 1573. En sont notamment caractéristiques les spectaculaires corbeaux sculptés soutenant les balcons tandis que le vocabulaire floral des bas-reliefs et les réseaux géométriques renvoient à la riche tradition décorative des terres d’islam. Akbar organisa des controverses théologiques restées célèbres dans le fameux pavillon du Diwan-i Kas. Le site fut abandonné du fait du difficile approvisionnement en eau.


Bénarès
Située sur la rive gauche du Gange, Bénarès (actuelle Varanasi) est l’une des villes les plus sacrées de l’Inde et un grand lieu de pèlerinage pour les hindous qui l’associent au dieu Shiva. Ils y convergent de l’Inde entière pour y achever leur vie car mourir à Bénarès est un viatique pour obtenir la libération du cycle sans fin des renaissances (samsara). Construits sur les rives du Gange, de vastes escaliers de pierre (ghat), bordés de temples et de palais, permettent aux fidèles de se livrer à divers rites religieux et de s’immerger dans les eaux du fleuve purificateur. Certains de ces ghats sont exclusivement consacrés à la crémation des morts.


Le Rajasthan
Du fait de sa tradition martiale et féodale et de ses alliances avec les Moghols dès la fin du 16e siècle, le Rajasthan conserve un admirable patrimoine architectural : forts et forteresses inexpugnables, palais et pavillons lacustres dont le décor témoigne d’un raffinement extrême et d’une foisonnante opulence. Outre ces remarquables témoignages d’architecture palatiale, le Rajasthan est également célèbre pour abriter quelques-uns des plus beaux temples jains – tels les ensembles architecturaux de Ranakpur et du mont Abu, renommés pour la finesse de leurs sculptures taillées dans du marbre blanc, travaillé et ciselé comme de l’ivoire.


Agra
Agra fut l’une des grandes capitales de l’Empire moghol. Les monuments élevés par trois empereurs successifs – Akbar (r. 1556-1605), Jahangir (r. 1605-1627) et Shah Jahan (r. 1628-1658) – le bâtisseur du célèbre Taj Mahal – en font l’un des hauts lieux de l’architecture moghole et une spectaculaire création d’urbanisme s’étalant le long du fleuve Yamuna. Le mausolée d’Itimad al-Dawla, élevé par l’impératrice Nur Jahan, l’épouse de Jahangir, et achevé en 1628, met en oeuvre un certain nombre de partis pris architecturaux et décoratifs qui seront ceux du Taj Mahal sous le règne de Shah Jahan et connaîtront une grande pérennité : usage contrastant du marbre blanc et du grès rouge, édicules d’angle à minces colonnettes – ou chattri – se muant parfois en minarets ; profusion d’incrustations de pierres dures en d’éblouissantes marqueteries polychromes d’inspiration italienne. Le Fort Rouge (Lal Qila), fondé en 1565 par l’empereur Akbar, puis agrandi et embelli par ses successeurs, compose un ensemble grandiose.


Taj Mahal, Agra
Le Taj Mahal fut érigé de 1632 à 1643 par l’empereur Shaj Jahan (r. 1628-1658) pour abriter la dépouille de l’épouse bien-aimée Mumtaz Mahal, morte en 1631. Le mausolée, pris dans un vaste complexe architectural, se dresse au fond de la perspective d’un jardin quadripartite sur le modèle persan (chahar bagh) conçu comme le reflet terrestre et symbolique du Jardin de Paradis mentionné dans le Coran. Élevé sur une terrasse revêtue de marbre blanc reposant elle-même sur une plate-forme de grès rouge, le mausolée de Mumtaz Mahal, de forme compacte dont chaque face est évidée par des répétitions d’arcatures de tailles variées, adopte un plan dit « en huit paradis » issu de l’architecture islamique d’Asie centrale. Il est coiffé d’un dôme en bulbe à double coque également issu d’Asie centrale.


Découverte du Cachemire
Le renouveau du paysage en peinture au 18e siècle inspire les premières générations de photographes. Dans bien des cas, ils adoptent des techniques d’enregistrement photographiques qui leur permettent de capter une infinité de détails concourant à la compréhension de la topographie. Américains ou Européens, les photographes partis en quête de nouveaux espaces en Inde y arrivent nantis d’une riche culture visuelle. Samuel Bourne, actif en Inde de 1863 à 1870, capte, à l’occasion de trois importantes expéditions au Cachemire, les premiers paysages d’exception de cette région aux beautés exceptionnelles : montagnes, splendeur de la végétation, abondance de l’eau, produisent des images aux valeurs contrastées.