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Livres

 

“To tell my real intentions, I want to eat only haze like a hermit” photographies de Katherine Longly

Editions d'artiste - 61 exemplaires réalisés à la main

 

www.katherine-longly.net
www.katherine-longly.net/to_tell_fr.php

 

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légendes de gauche à droite
1/ Couverture To tell my real intentions, I want to eat only haze like a hermit de Katherine Longly. © Katherine Longly. [édition d'artiste - 61 exemplaires réalisés à la main].
2/ Autoportrait de Katherine Longly en purikura.

 


texte de Julie-Marie Duro, rédactrice pour FranceFineArt.

 

J’ai rencontré Katherine Longly quelques fois à Bruxelles ou à Tokyo. Elle m’a parlé de son projet. Un peu. Je vois depuis quelques années des images qui défilent sur son mur Facebook. Aujourd’hui, son livre est sur la table de la cuisine, toujours dans sa boite. Je suis curieuse et j’appréhende. J’ai peur parce que j’éprouve un amour (presqu’) aveugle pour le Japon et que la critique m’est parfois difficile. J’ai peur parce que j’ai longtemps eu un rapport perturbé à la nourriture et que je n’ai pas toujours envie de me plonger dans les eaux troubles de mes propres démons. Mais c’est peut-être aussi pour ces raisons, et parce que j’aime le travail de Katherine Longly, et parce que les livres réalisés en collaboration avec Yumi Goto m’inspirent ( et aussi – j’avoue – parce qu’elle m’a dit qu’il y avait du papier japonais) que j’ai envie de poser mon café un peu plus loin sur la table. Comme l’ouvrage est entièrement réalisé à la main, c’est mieux ! Il est donc temps de découvrir ce qui se cache derrière le mystérieux To tell my real intentions, I want to eat only haze like a hermit.

Voilà. J’ouvre la boite. L’ouvrage est emballé comme une friandise dans du plastique transparent aux reflets rose bonbon et vert néon. Il m’ouvre l’appétit, tout cousu de fils roses eux aussi. Kawaii. Mais on comprend très vite que sous ses abords girly, l’histoire dans laquelle on entre parle de femmes – et un peu moins d’hommes – mais n’a rien de mignon. Ce n’est pas vraiment trash non plus quoique le rendu des appareils photos jetables puisse donner un coté percutant, plastic, qui contraste à merveille avec l’esthétique propre de l’auteur. Bref, Katherine Longly propose une petite archéologie des troubles alimentaires qui nous rappelle que « manger n'est jamais seulement un acte technique ». Et ça nous prend aux tripes.

To tell my real intentions, I want to eat only haze like a hermit s’articule autour de onze témoignages, celui de l’auteur inclus. Se succèdent ainsi des univers très différents reliés par le même rapport complexe et douloureux à l’alimentation, au corps pour soi et au corps pour les autres. Même outil technique, différence d’approche. Car l’artiste rend à chacun le contrôle sur sa propre histoire en leur demandant de raconter leur rapport à la nourriture à l’aide d’un appareil photographique jetable. Contrôle sur le contenu, mais pas sur l’image à une époque où les Snapchat et les purikura (photomaton de divertissement) rendent les peaux trop douces, les yeux trop grands et les corps trop fins.

L’histoire que je quitte se passe au Japon où le contrôle du corps par l’alimentation semble conduit à son paroxysme. Mais sous l’angle particulier de la culture nippone, grâce à un traitement intime, c’est à chacun de nous que parle l’artiste. L’alimentation est ce lieu complexe du rapport à soi et à la société que la biologie ne nous permet pas d’esquiver. D’ailleurs, pendant l’écriture de ce court article, j’ai bu trois cafés et pris un copieux petit-déjeuner.

Julie-Marie Duro

 


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3/ et 4/ Katherine Longly, To tell my real intentions, I want to eat only haze like a hermit [Auteure Katherine Longly]. © Katherine Longly.
5/ Katherine Longly, To tell my real intentions, I want to eat only haze like a hermit [Auteure Yuki]. © Katherine Longly.